
1) L’objectivité : Les théories scientifiques ne dépendent pas d’un point de vue particulier. Elles sont indépendantes du sexe, de la race, de la religion, etc. ainsi que de la position géographique ou temporelle.
2) La systématicité : Les théories scientifiques essaient de représenter autant de phénomènes d’un domaine que possible dans une loi aussi simple que possible. Dans le cas idéal, on disposera d’une seule théorie simple réunissant tous les phénomènes en posant des lois universelles.
3) La méthode expérimentale : Une loi est établie uniquement si elle permet de prédire des nouveaux phénomènes qui sont ensuite confirmés par l’observation ou l’expérience scientifique.
Chacun de ces traits soulève des questions épistémologiques spécifiques.
L’argument de l’induction pessimiste
En étudiant l’histoire des sciences, on constate que la plupart des théories scientifiques de jadis ont été remplacées par d’autres théories scientifiques. Se pose alors la question philosophique de savoir si ce remplacement est l’indice d’un progrès scientifique nous conduisant vers une connaissance de la nature, ou s’il ne s’agit que d’un aménagement théorique nous permettant uniquement de faire des prédictions plus exactes.

Une théorie remplacée n’est pas forcément une théorie inutile. Il convient donc de faire une distinction entre l’utilité et la vérité d’une théorie. L’astronomie de Ptolémée était utile pour la navigation, mais il était faux de supposer comme elle le faisait que tous les corps célestes tournent autour de la Terre. Pour prendre un exemple contemporain, si on considère des corps d’une grandeur moyenne, la mécanique classique suffit dans la pratique. Par exemple, pour l’ingénieur qui cherche à construire un pont sur la Seine, la mécanique classique est opérationnelle. Si, en revanche, il s’agit de produire des lasers semi conducteurs, il est indispensable de recourir à la mécanique quantique.
Qu’est-ce que le réalisme scientifique ?
Ainsi deux arguments nous orientent dans des directions opposées : l’argument de l’induction pessimiste, selon lequel il est inutile d’aspirer à une théorie vraie, et l’argument du miracle, selon lequel nous pouvons être assurés de nous trouver sur le chemin qui nous conduit à la connaissance de la nature. L’objet de discorde entre ces deux arguments est celui du réalisme scientifique. L’argument du miracle plaide en faveur du réalisme scientifique, alors que l’argument de l’induction pessimiste le met en cause. Avant de se lancer dans ce débat, il est indispensable de disposer d’une conception claire du réalisme scientifique. On souscrit au réalisme scientifique si et seulement si on accepte les trois propositions suivantes :
1) Proposition métaphysique : L’existence et la constitution de la nature sont indépendantes des théories scientifiques. L’indépendance est à la fois ontologique et causale : ni l’existence, ni la constitution de la nature ne dépendent de l’existence de théories scientifiques. Si des personnes formulent des théories scientifiques, les théories ainsi produites ne causent en aucune matière l’existence ou la constitution de la nature.
2) Proposition sémantique : La constitution de la nature détermine quelles sont les théories scientifiques vraies (et quelles ne sont pas vraies). Par conséquent, si une théorie scientifique est vraie, les objets que postule cette théorie existent et leur constitution rend vraie la théorie en question. Autrement dit, la constitution du monde est le vérificateur (« truth-maker » en anglais) de la théorie en question.
3)Proposition épistémique : Les sciences sont, en principe, capables de nous donner un accès cognitif à la constitution de la nature. En particulier, nous avons à notre disposition des méthodes d’évaluation rationnelle applicables à des théories scientifiques concurrentes – ou à des interprétations concurrentes d’une même théorie – qui sont capables d’établir, au moins de manière hypothétique, laquelle de ces théories ou interprétations concurrentes est la meilleure au niveau de la connaissance
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Extrait du titre Philosophies des sciencesPublié chez EPFL PRESS



